par F.P,
avec l’aimable autorisation de Chartres Sanctuaire du Monde
En 2017 Chartres Sanctuaire du Monde consacrait une partie de son action de mécénat en faveur de la restauration des vitraux de la chapelle Saint-Piat, moins connus que ceux de la nef et des bas-côtés, mais pourtant admirables.
Après leur dépose, ils sont partis chez les maîtres verriers sélectionnés par la DRAC suite aux appels d’offres.
Ces verrières, qui font revivre quelques épisodes de la Bible et de grands saints, dont sainte Thècle, très populaire au Moyen Âge, méritent une large présentation.
La grande verrière du chevet plat (XIVe) retient particulièrement l’attention. La Résurrection des morts et le Jugement dernier occupent les compartiments du tympan, dans lequel s’inscrit une rose à sept lobes.
Au centre, le Christ siège comme juge suprême ; autour de lui, cinq anges portent les instruments de la Passion, deux autres sonnent de la chalémie (ancêtre du hautbois).
À sa droite et à sa gauche, au centre du quatrefeuille, la Vierge et saint Jean l’Évangéliste intercèdent pour les humains.
Au-dessous, saint Michel pèse les âmes et, de chaque côté, dans quatre petites ouvertures à trois lobes, est figurée la résurrection des morts.
Au bas de la verrière, six lancettes accueillent des saints, dont la cathédrale possède les reliques. Ils sont identifables grâce à des inscriptions qui permettent de reconnaître de gauche à droite : saint Turiaf, évêque de Dol, sainte Thècle, saint Piat, saint Tugdual évêque de Tréguier et deux évêques anonymes.
Tous ces saints sont surmontés d’un grand dais orné de motifs inspirés par l’architecture du temps. Les architectures religieuses alternent avec les architectures militaires qui s’avèrent être de fidèles documents de ponts-levis, mâchicoulis, barbacanes, bretèches, échauguettes et tours crènelées au sommet desquelles émergent des têtes grotesques.
(Sources : Y. Delaporte, Les vitraux de la chapelle Saint-Piat, MSAEL, t15,p33-58)
Sainte Thècle
Sainte Thècle fut la première vierge martyre. Elle se convertit après avoir rencontré saint Paul au cours de son premier voyage en Asie Mineure au milieu du Ier siècle. Subjuguée par la prédication de Paul à Iconium (Konia en Turquie actuelle), Thècle rompt ses ançailles, préférant le Christ comme divin époux. Condamnée par le gouverneur romain, elle survit à six tentatives de mises à mort : le feu, les fauves, des animaux marins dans un bassin qui lui donnent l’occasion de se baptiser, croyant sa dernière heure venue, et enfin des taureaux destinés à l’écarteler. Rien n’y fait : elle survit, accompagne Paul, puis part seule enseigner la foi chrétienne, jusqu’à sa mort à 90 ans à Séleucie en Turquie.
Un pèlerinage important s’y développe et de nombreux monastères entourent son sanctuaire jusqu’au VIème siècle environ.
D’illustres Pères de l’Église, tels saint Ambroise et saint Augustin, et de nombreux écrits, font référence à Thècle comme modèle de sainteté féminine.
Très populaire dans l’Antiquité, ses reliques reposaient au-dessus de l’autel des corps saints à côté d’autres saints comme saint Piat et quelques uns des premiers des évêques de Chartres.
Aujourd’hui, presqu’oubliée en Occident – à l’exception de pèlerinages le jour de sa fête le 24 septembre : en Lozère et Bretagne ; en Espagne à Tarragone dont elle est la patronne –, elle reste vénérée des chrétiens d’Orient : 42 églises lui sont consacrées au Liban.
Son sanctuaire en Turquie est en ruines, et son tombeau dans un monastère en Syrie à Ma’aloula a été détruit par la guerre il y a deux ans (màj : en 2013). Mais cette figure vénérée d’une sainte, modèle de virginité, a inspiré de nombreuses œuvres d’art à travers le monde : fresques, peintures, sculptures, ampoules, reliquaires et vitrail comme dans la chapelle Saint-Piat.
Article original publié dans la Lettre de Chartres Sanctuaire du Monde (février 2017)
photos : © Drac-Centre-Val-de-Loire – François Lauginie