Tandis qu’est édifié le portail royal et que sont réalisées les trois grandes fenêtres de la façade occidentale, la cathédrale – ou l’abbaye Saint-Père-en-Vallée, en basse ville – produisent également plusieurs manuscrits dont le décor est à l’égal de la sculpture et de l’art verrier : un sommet artistique.
L’un de ces trésors, dont l’origine chartraine a été identifiée par François Avril, l’un des meilleurs spécialistes mondiaux, se trouve aujourd’hui à la Bibliothèque Nationale, où il porte le n° 55 des manuscrits latins. Il est visiblement le premier volet d’une Bible dont le manuscrit latin 116 formerait la deuxième partie. On peut le dater entre 1150 et 1170.
Les lettres ornées utilisent plusieurs motifs dont les plus courants sont le rinceau et le dragon, combinés avec une imagination virtuose – où l’on ne sait jamais bien ce qui est animal et végétal. Des feuilles de formes variées ajoutent à la profusion. De petits hommes nus s’accrochent aux tiges et marchent au travers. Pour certaines lettres, on a également figuré des personnages bibliques, en rapport avec le texte.
Les couleurs utilisés sont assez réduites : bleu, vert, chair et rouge. Le fonds sur lesquelles elles se détachent est fréquemment doré.
Voici une sélection des plus belles lettres :
Il n’est pas sans intérêt de comparer ces décors à ceux du portail royal. On pense évidemment aux colonnettes, au décor exubérant, qui sont en arrière des statues des ébrasements. La parenté est troublante, pour peu que l’on restitue par l’imagination la polychromie d’origine.