1980 - Pierre Fimin-Didot

Sa vie durant, Pierre Firmin-Didot ne cessa de se dévouer à l’insigne basilique, porté par sa vision globale de l’univers de Chartres : campagne pour un nouvel orgue dès 1964, puis le Concours international « Grand Prix de Chartres » et le Festival d’orgue ; le Centre international du vitrail en 1980, l’association Chartres, sanctuaire du Monde en 1992…
Nous lui rendons aujourd’hui hommage par les mots de Lynne Davis Firmin-Didot, son épouse.

« Cet été 2021 nous avons vécu les derniers moments musicaux sur le grand orgue de la Cathédrale de Chartres. Dès la fin du mois d’août, un échafaudage sera érigé pour pouvoir enlever tout l’instrument – les tuyaux, la console et tous les éléments de la mécanique afin de laisser la place à un instrument tout neuf qui sera construit d’ici 3 à 4 ans. C’est une grande et belle nouvelle qui ravira tout le monde de l’orgue à la fois national et international. Ce nouvel instrument prolongera naturellement la vie et la grande renommée du concours international de l’orgue et son festival d’été.

Nous célébrons cette année le centenaire de la naissance de Pierre Firmin-Didot et cet hommage que nous lui rendons est doublement émouvant puisque les concerts d’orgue de cet été 2021 qui font partie du grand Festival d’Été qu’il a fondé en 1975, sont les derniers sur cet instrument.

Le grand orgue actuel, Danion-Gonzalez, a été installé il y a 50 ans, grâce à l’initiative inédite de Pierre Firmin-Didot. Les racines de cette initiative sont nées dans son cœur, dans son esprit et par sa volonté. Touché dès son plus jeune âge par la beauté de la cathédrale et l’harmonie de la liturgie, il racontait que lorsque le Général de Gaulle est venu pour une grande cérémonie à la cathédrale, le grand orgue était hors d’usage et l’on a dû faire venir un orchestre. Pour Pierre Firmin-Didot, il devait donc agir et en 1964, il a commencé à mener une campagne pour sauver les grandes-orgues, apportant un peu plus de la moitié des fonds nécessaires à leur rénovation. S’étant entouré des plus grands maîtres de l’orgue à l’époque, il a fondé alors le concours international, « Grand Prix de Chartres », puis le Festival d’été en 1975.

Depuis, dans le monde entier, le mot « Chartres » est devenu synonyme de l’excellence dans le monde de l’orgue. Le grand orgue de la cathédrale ayant retrouvé sa voix, il était important dans l’esprit de Pierre Firmin-Didot qu’en dehors de la liturgie, l’orgue puisse se faire entendre à l’occasion de manifestations culturelles destinées au rayonnement international de la cathédrale. Chartres était dès lors à l’échelle mondiale, attirant les plus grands talents et interprètes internationaux.

1964 – Pierre Firmin-Didot aux claviers de l’ancien orgue de la cathédrale de Chartres © L. Davis-Firmin-Didot
1964 – Pierre Firmin-Didot à la console de l’ancien orgue, au début de la création de l’association pour la rénovation des orgues de Chartres © L. Davis-Firmin-Didot
1964 – Pierre Firmin-Didot à la console de l’ancien orgue, au début de la création de l’association pour la rénovation des orgues de Chartres © L. Davis-Firmin-Didot
Autour de 1971, Pierre Firmin-Didot à la console du grand orgue Danion-Gonzalez © L. Davis-Firmin-Didot
Pierre-Firmin Didot et son épouse – ambassade des États-Unis, Paris, lors du premier gala au profit de l’association des grandes orgues de Chartres © L. Davis-Firmin-Didot
1980 – Pierre Fimin-Didot et son épouse Lynne Davis © L. Davis-Firmin-Didot

C’était un énorme travail et Pierre Firmin-Didot y consacrait tout son temps.  Toute cette organisation avait pour but ce moment unique du concours ou du concert en la cathédrale. Chaque dimanche de l’été, de 1975 à 2000, Pierre Firmin-Didot accueillait le public et présentait les concerts. On revoit sa haute silhouette à la croisée des transepts ou dans l’allée centrale où il vendait des programmes et faisait la quête, l’entrée étant toujours gratuite.

On se souvient du dimanche des finales du concours : l’excitation dans l’auditoire lors du passage des finalistes, le jury affairé à prendre des notes, la présence d’une grande partie du corps diplomatique, le grand tapis tout le long de l’allée centrale, le fourmillement des auditeurs lors de l’annonce du Grand Prix, la partie presse dans le chœur qui transmettait les nouvelles toutes fraiches depuis la cathédrale.  L’organisation de cette journée a toujours fait l’objet d’une grande précision.

Pierre Firmin-Didot nous aura permis de vivre ces moments d’écoute partagée. Des instants où la beauté nous touche profondément, car elle est présente sur tous les plans : la pureté des lignes architecturales de la Cathédrale qui nous élève et nous apaise – et puis l’alliance de la lumière et de la musique dans ce monument qui dégage une atmosphère si particulière.

Ainsi, sa vie durant, il ne cessa de se dévouer à l’insigne basilique de Chartres. Porté par cette vision globale de l’univers de Chartres, il a ensuite créé le Centre International du Vitrail en 1980 et enfin, la fondation de Chartres, sanctuaire du Monde en 1992, toutes deux associations d’envergure au service de Chartres et de sa cathédrale.

Pierre Firmin-Didot était un pionnier : il portait la « vision » moderne du patrimoine. 
Alors qu’à son époque le mot n’était encore qu’un terme de notaire, il savait qu’il deviendrait la croisade de notre temps, qu’il incarnerait la question de l’identité et se transformerait en cause nationale, qui embrasse aujourd’hui la sauvegarde et la conservation des œuvres et des édifices historiques.

Pierre Firmin-Didot accordait toujours une confiance entière à toutes les personnalités engagées, qu’il lui plaisait de réunir en cercles d’amitiés ferventes, dans un même élan de tradition française de distinction et de bel esprit, afin d’œuvrer pour que l’« Univers de Chartres » conduise les âmes de bonne volonté sur le chemin qui mène à la Vraie Lumière immatérielle.

Nous célébrons cette année le centenaire de sa naissance – 1921-2021.  Il est disparu en 2001, la 20e année de notre mariage, et tout au long du chemin parcouru ensemble, il m’a donné l’occasion – pour une Américaine venue du Michigan en France, il y a tout juste 50 ans – de voir d’en haut ce monde merveilleux de l’orgue français et d’apercevoir cette lumière spéciale et glorieuse qui vient tout particulièrement de Chartres.

C’est ainsi que j’ai voulu rendre hommage à mon mari, Pierre Firmin-Didot, un grand homme de cœur et de devoir, à qui le monde de l’orgue doit une révérence toute particulière pour le prestige et la persévérance qu’il a montré et qu’il a laissé aux générations à venir ». 

On l’entend toujours dire :

« Chartres, c’est vous ! »

Lynne Davis Firmin-Didot