La cathédrale, au fil du temps, continue de fasciner – voire d’interroger – les maîtres d’œuvre. Que Chartres ait inspiré au XIXe siècle les tenants du style ‘néo-gothique’ (Lassus et Viollet le Duc parmi eux) n’est évidemment pas pour nous surprendre.
Ce que l’on sait moins et qui témoigne de la vitalité : de nombreux architectes actuels, dont plusieurs revendiquent d’appartenir aux avant-gardes, expliquent comment leur vision – personnelle – procède néanmoins de ‘chocs esthétiques’, au regard des grandes réalisations du passé. Chartres est parmi les édifices les plus souvent cités, notamment pour la réflexion qu’elle peut engendrer sur le rapport volume/paroi : une dématérialisation de l’espace, dont on pourrait sentir dans la cathédrale les premières velléités.

Les propos de Bruce GRAHAM, tournés vers l’aspect ‘musical’ de l’architecture, rejoignent ceux de Rodin, déjà publiés dans l’hebdo-cathédrale (n°103). Bruce GRAHAM, qui avait accédé subitement au rang d’icône de l’architecture contemporaine, s’est éteint en mars 2010. Il est l’auteur de deux buildings futuristes, situés au centre de Chicago : le John Hancock Center et la Willis Tower – plus haut édifice mondial (108 étages, 444 mètres) au moment de sa construction (1974).

Willis Tower © Bruce GRAHAM
John Hancock Center © Bruce GRAHAM

« Je vais vous dire ce qui différencie mon idée de l’architecture de ce que bon nombre d’autres architectes pensent. D’abord, l’architecture n’est ni de la peinture ni de la sculpture. Elle est beaucoup plus proche de la musique dont l’une des composantes est le temps. L’architecture partage l’espace et le mouvement. Elle a quatre dimensions : c’est ce que j’ai appris en me rendant à Chartres ».

« Je grimpais sur la colline, j’y découvris la place puis la cathédrale, j’y pénétrais et soudain ce fantastique espace s’est ouvert à moi ».

« Il y avait un enterrement, et ils jouaient le Requiem inachevé de Mozart. Je me suis mis à pleurer. Se déplacer dans cet espace avec cette musique était incroyable ».