Durant la restauration du chœur & du haut-chœur entre 2009 et 2011, une bâche imprimée avait été installée en avant du chœur, permettant d’imaginer ce qu’était l’ancien jubé de la cathédrale.
Voici toutes les clés pour comprendre l’histoire du jubé – avec des clichés méconnus…

À propos du jubé de la cathédrale
 
Quand il franchit les portes de Notre-Dame, le visiteur est saisi par la longueur du vaisseau : plus de 100 m jusqu’au maître-autel, situé au fond du chœur. C’est oublier que lorsque l’édifice a été construit, un ‘paravent’, haut de plus de cinq mètres, barrait l’entrée du chœur. Ainsi que le fait encore l’iconostase dans la liturgie des Églises orthodoxes, le jubé enfermait précieusement l’essentiel de la messe, dont on voulait souligner les aspects mystérieux. Son nom même provient de l’une des rares paroles qui était prononcée – en latin – à l’adresse de tous les assistants, depuis la plate-forme qui le couvrait : Ordonne, seigneur, de bénir… Le jubé de Chartres (v. 1230-1240) n’était donc pas une exception, mais il était probablement l’un des plus beaux…

Le concile de Trente, au XVIe siècle, ordonna de rendre les célébrations accessibles à tous les participants – pour que dans le faste, puisse s’exprimer la gloire de Dieu et que celle-ci porte à une véritable émotion. C’est l’époque où naît l’adoration eucharistique : il faut voir tous les gestes du culte, notamment au moment de la consécration de l’hostie et du vin. Le jubé, d’un coup, devient tout à fait contraire à l’ère du temps. À Chartres, comme dans la majorité des sièges épiscopaux (Bourges, Amiens…), il faut attendre le milieu du XVIIIe siècle pour qu’on se décide de l’abattre, à l’occasion d’un réaménagement total du sanctuaire – au goût du jour. En avril 1763, l’évêque approuve le projet de démolition proposé par les chanoines, qui soulignent au surplus les risques d’un effondrement : le jubé finit par donner des signes de fragilité. Il est remplacé (1767-1769) par une importante grille de fer et cuivre avec dorures, encadrée par deux massifs sculptés (tous éléments installés au rez-de-chaussée de la tour sud).

à suivre…

Gravure dite ‘de Larmessin’, mettant en scène certains hauts faits de l’histoire du sanctuaire. « L’église Notre Dame veue par dedans à l’entrée de laquelle est le baron du Brueil qui veint offrir à la Vierge le boulet de canon dont il a esté frappé sans estre blessé ».
Le jubé est bien visible, en avant duquel se trouve alors, côté gauche, la statue de Notre-Dame du Pilier.
Impression datée de 1723, gravée par Le Roux sur un dessin de Petit, éditée par Moquet « au soleil d’or, rue des trois maillets »,  à Chartres. « Figure des cinq grosses cloches de l'Eglise cathédralle de Nostre dame de Chartres fondues dans le mois de septembre 1723, sous l'auguste reigne de Louis XV et du pontificat de Charles François de Merinuille Evesque de Chartres ». Détail du jubé.
Gravure du sacre d’Henri IV, éditée dans les dernières années du XVIe siècle. « Cérémonies du sacre et couronnement d’Henri IV qui furent faites en l’église cathédrale de Chartres le dimanche 27 février 1594 ».
En bas de la gravure, un cartouche est intitulé « Procession faite après le couronnement d’Henri IV ». Le jubé sert de fond à la file ininterrompue des différents prêtres et dignitaires royaux.
Gravure signée Jean-Baptiste Rigaud, et datant du milieu du XVIIIe siècle. On peut mettre cette représentation du jubé en parallèle avec un extrait du plan de Félibien, datant de la fin du XVIIe siècle. Ce sont les documents qui, conjointement aux fragments retrouvés dans la cathédrale, ont permis à plusieurs archéologues de proposer un dessin reconstituant l’ancien jubé.
Hypothèse de l’historien d’art allemand Hermann Bunjes - vers 1943.
Document de travail, conservé à la Bibliothèque de l’architecture et du patrimoine, probablement issu des archives de l’architecte en chef Jean Maunoury - vers 1950.
Proposition des collaborateurs de l’historien d’art Louis Grodecki, sur demande de Jean Taralon, inspecteur général des monuments historiques - 1952.
Reconstitution de Jean Mallion (1964) dont la thèse de doctorat était consacrée au jubé de la cathédrale.
La restitution du jubé, effectuée pour la durée des travaux du chœur, à l’initiative de M. Jean-Pierre Blin, conservateur régional des Monuments historiques, avec le concours de M. Patrice Calvel, architecte en chef des monuments historiques.
On prendra le temps d’apprécier les très belles compositions florales, réalisées par Mme Odile Steinmetz, alors fleuriste de la cathédrale. Une contribution comme toujours remarquée à la liturgie et à la beauté de la cathédrale.