Intervention de Gilles Perrault, professeur à l’IDETH, expert auprès de la cour d’appel de Versailles, au sujet des vitraux de la cathédrale.

« Chartres : […] Sa splendeur reflète les prouesses et les innovations artistiques et architecturales, comme le portail nord, la nef, le labyrinthe et les vitraux.
Notre souci commun : l’expertise. Notre choix s’est donc orienté vers un sujet peu courant : le vitrail. Les premiers vitraux font leur apparition dans les églises à partir du IXe siècle (Aix la Chapelle), mais il nous faut patienter jusqu’au XIe siècle pour que nous conservions les traces des premiers vitraux français.

À cette époque et jusqu’au XVIe siècle, le verre est coloré dans la masse avec des oxydes métalliques mélangés dans la pâte en fusion.
Le maître ouvrier découpe ses morceaux en se guidant à l’aide de gabarits et dessine les détails au trait à la grisaille. Cette poudre de verre mélangée à un oxyde métallique, fond à 650° C, en-dessous de la température de fonte du verre plein. Réchauffé à cette température, le verre plein coloré se ramollit et se « colle » avec le verre en poudre fondu. En refroidissant, le dessin à la grisaille se trouve donc vitrifié et fait partie du carreau.
Les carreaux ou pavés sont ensuite assemblés à l’aide de baguettes en plomb profilées en H horizontal, qui après découpe, conformation et sertissage sont soudées entre elles à l’étain (l’armature en plomb ne peut être coulée car le choc thermique provoqué par le métal en fusion serait fatal au verre).
Les fenêtres sont divisées par panneaux d’environ 1 m2, pincés entre les feuillards et les barlotières maintenues par les clavettes.

Le verre ancien qui était obtenu par dépôt d’une paraison sous fusion, donc liquide sur une dalle réfractaire pivotante, comporte des traces d’excroissances circonvolutives. Il était ensuite découpé par chocs thermiques pour les lignes droites en appliquant un fer plat chaud, puis grignoté pour obtenir les courbes avec la pince à gruger.
Depuis le XIXe siècle, le maître verrier utilise du verre soufflé ou en dalle. La singularité des bulles, de l’épaisseur et l’absence d’excroissances ne peuvent pas tromper l’œil de l’expert tout comme la coupe moderne au diamant qui ne laisse pas la même trace que le choc thermique.

Les plombs d’origine n’existent plus à Chartres car ils sont changés régulièrement tous les 40 à 100 ans selon leurs expositions. Ils ne supportent pas aussi bien que le verre les attaques des intempéries et des gaz acides.
Les plombs du XIXe et du XXe siècle sont plus faciles à manier, mais plus fins donc plus fragiles.